mercredi 3 décembre 2008

la vie merveilleuse de julien cocquerel

1.
je suis malheureux
non, épuisé
mon eau est croupie
il y a des blocages
de la fraîche me ferait du bien
pas de l’alcool en quantité
mais il n’y a que ça
(ou je ne veux que ça)
j’arrache les toiles d’araignées
avec une bouteille vide
je me remémore des visages de femmes
les corps, la courbe des fesses et
les hanches
c’est l’unique beauté que me
recréent mes cuites
c’est l’unique beauté de ma vie
je pense qu’elle va au-delà de tout
ce que vous pouvez penser
car la vie est la beauté, la souffrance,
les couinements de porc, le christ en rut,
les pleurs de sa mère, ma gloire, les chattes fumantes

2.
le compte en banque et les goûts personnels
reposent sur des bases si fragiles
qu’on finit par leur donner de l’importance
qui veut se retrouver nu sur la place du marché
et donner ses biens aux prostitués lourdement maquillées ?
qui veut aimer les bêtes comme on aime une chose ?
il n’y a rien de plus beau qu’un homme qui paye
une crève-la-faim du tiers-monde pour se faire pomper
là est la beauté entière
nous ne recherchons que cela
alors oui traverse les mondes, celui des fantômes affamés et
celui des femelles (qui s’offrent nues au regard
des hommes), traverse et reviens si tu veux
qu’auras-tu fait sinon connu la précipitation et espéré
l’éveil, si les pierres te plaisent, il faut les manger, les sucer
les broyer si la douleur est dans le crâne, c’est que nous
sommes loin de la sainteté, très loin car le saint
jamais ne souffre même paralysé, martyrisé, humilié, roué
jamais ne souffre
en lui infuse ce qui est
jamais ne doute
jamais ne veut
jamais ne cherche

3.
tu sais peut-être que les gens de peu ont la foi simple du cordonnier
et qu’ils adorent plus que tout la vierge marie
qui console les cœurs meurtris
leur misère, si longue et si chiante, pour l’écouter
qui sera là ?
nous aussi souhaitons la misère de ceux qui font souffrir
nous ne voulons pas leur ouvrir nos lits, l’envers de nos tiroirs
et les grains de poussière, papiers, trombones, briquet, souvenirs
qui y traînent ni leur donner du bon vin, de la bonne bouffe
nous aimons penser qu’ils échapperont toujours à notre colère
et que c’est ça qui les rend vraiment irrécupérables
imagine que c’est un tas de merde et que chaque jour
nous devons les enduire de notre bave de gentillesse et d’attention
(récoltée par des nymphes chaudes)
avec un pinceau voire nos cheveux s’ils sont suffisamment longs
c’est l’objet de tout notre être, de tout notre temps, de toute notre vie
et je comprends toujours pas grand chose à tout cela
mais si, au fond, on pouvait raconter la première prise de lsd
le premier sexe crade, l'œil torve d’un poisson tué gratuitement
tout serait plus simple

4.
aujourd’hui j’ai rangé mon intérieur, il y avait pas mal de choses
et pas que des objets, des animaux beaucoup, des déchets
j’aimerais bien tout perdre mais c’est trop facile, trop prévisible
ma mémoire fonctionne comme une étagère et l’amour des bêtes
me montre pourtant que c’est stupide

5.
un regard un peu plus humide, oui
une chute de reins trop marquée, c’est tout
là voilà pour hanter le champ de mon esprit
qui dira le contraire, qui connaît plus beau, terrible
et l’amour ne saurait souffrir pareille errance
les petites perdrix, les clefs rouillées, la voix nasillarde
ulysse (et les siens) n’est pas mieux que moi, je l’aide
à ne pas trop souffrir quand les voiles se dégonflent
la plaine aux couleurs de dévastation, où s’est enfuie la vie ?
quand je vole au-dessus pourquoi aurai-je peur ? la gorge se plaque
il est impossible de ne pas s’étouffer et pourtant je suis le roi
esse percipipi
merveilleux de ce pays mort que j’aime tant, aux mille caprices
dont celui de ma vie, mon souffle, la paix, pacotille !

6.
le cauchemar, la boue de caféine et de chien mouillé
au seuil des joies que je partage avec les piafs connards
je l’aime
et ma chair jamais ne touche
mon esprit jamais ne trouble
oui c’est vrai
chloë prenait beaucoup de cachets pour atteindre l’éveil ou
la libération je ne sais
vraiment beaucoup et parfois pétait les plombs, à poil dans les
rues de paris à hurler après moi, les ténèbres, les requins, c’est égal
lola se faisait sauter par tout ce qui passait pour découvrir l’âme humaine
vraiment tout et parfois pleurait
« tu ne m’aimes pas tu ne m’aimes que pour le sexe, baby
je t’aime you know toi tu as des limites »
la découverte de l’infini est importante

7.
le roi je l’ai aimé, ses armées suivies
les animaux de compagnie également
mon énergie, ma joie, mes affects, idem !
et ce qui reste, non, ce qui se dresse
est extraordinaire, digne du yéti, des temps
glorieux, de rome, de la crémière que tout le village
oui ! un jour viendra pour la sainteté
vous qui souffrez, qui sentez le malheur sale
le jour viendra, cela fait partie de la beauté

8.
plus que tout, plus que tout quoi ? aux yeux des autres
dans le for intérieur de sa propre guerre, qu’est-ce qui vaut plus que tout
on s’échoue plus ou moins lamentablement
le lièvre élastique et électrique, les filles humides, les vieux qui sentent
les chicots, les verrues, l’haleine de bière, les yeux rouges
la grand-mère qui pisse en jet dans le seau que sa fille lui tend
l’une des personnes de la trinité chez les orthodoxes s’élève à un moment précis
de la messe, vers quoi, on ne sait pas trop, tout cela reste mystérieux
alors oui, je crois que sale-pute-sainte-et-apostolique s’avance sur le parvis
car la vue de matax-ratatax-atarax l’incommode :
- petite saleté, tu évites les questions, ça ne peut plus durer
- je te promets que non, je ne puis faire autrement, évite-moi alors
- ça ne marche pas comme ça
- ce sera donc la guerre
- pfffff
- pauvre fille
- bouffe tes morts
- même pas en rêve
- soit

9.
des pâtes et un steak surgelé, de la bière locale
comment m’aimes-tu
il y a une haie de corps de femmes et leur réalité est un comme un tourment
il est difficile de comprendre pourquoi leurs corps présentent une résistance
de corps, on ne le traverse pas si vous préférez
la fille la plus salope que tu as baisée
difficile à dire, ses yeux, sa démarche, tout le métro se retourne
comme des chiens, les clodos lui disent des trucs obscènes voire
se branlent direct

10.
le désir rend-il pâle la raideur du chevalier ?
c’est la fébrilité qui le saisit
quand il attrape la soubrette
effroyable, le plus grand des sentiments


11.
Begotten (1991)
Directed by E. Elias Merhige. With Brian Salzberg, Donna Dempsey, Stephen Charles Barry. God disembowels himself with a straight razor. The spirit-like Mother Earth emerges, venturing into a bleak, barren landscape. Twitching and cowering, the Son Of Earth is set upon by faceless cannibals.

12.
verse la haine de ton cœur, c’est le miel noir
que boit la cité rouge
elle dort et je tremble
elle tremble, je ne dors pas
le sexe doit à la violence ou l’inverse ?
qui est digne de la vérité ?
pas elle, pas toi

13.
Calvaire (2004)
Directed by Fabrice Du Welz. With Laurent Lucas, Brigitte Lahaie, Gigi Coursigny.
A few days before Christmas, traveling entertainer Marc Stevens is stuck at nightfall in a remote wood in the swampy Hautes Fagnes region of Liège, his van conked out. An odd chap who's looking for a lost dog leads Marc to a shuttered inn; the owner gives Marc a room for the night. Next day, the innkeeper, Mr. Bartel, promises to fix the van, demands that Marc not visit the nearby village, and goes through Marc's things while the entertainer takes a walk. At dinner that night, Bartel laments his wife's having left him, and by next day, Marc is in a nightmare that may not end.

14.
en progressant dans la choucroute bleue qui n’a pas de limites (et nous le saisissons)
il n’est pas absurde de créer des dieux et des monstres affamés
pour se diriger
celui qui ne le fait pas
risque de ne rien voir
de sombrer sans aucun intérêt dans le rien vide de tout
et les dieux sont dans le crâne de mon père, du sien, ad libitum
dans les synapses, dans la terre, dans le foutre, ils sont là
radieux quel que soit l’odeur des draps
ils sont là vieux et tigres, excitent l’âme, multiplient

15.
le calvaire de monica

16.
Ex Drummer (2007)
Directed by Koen Mortier. With Dries Van Hegen, Norman Baert, Gunter Lamoot.
Every village has its band of fools, trying to get to the top, following their idols in drug habits, but staying losers till the end of their pathetic days. They all do this in the name of rock & roll. Three disabled rock musicians are looking for a drummer. Dries, a well known writer, seems the right guy for the job, were it not for the fact that his only handicap is that he can't play the drums. He joins the group as a perfect, but evil god walking down his mountain to play with the populace. With the arrival of this infiltrator, personal disputes and family feuds start to jeopardize the band's fragile future. Dries will manipulate them till they are willing to drink each others blood and their only future is written down in many Punk lyrics: "No Future".

17.
dans les bois les porcs
ta lie, le sang vermillon et fluide
un monochrome ou un regret ?
heureusement il y a glenn gould
c’est la consolation d’une journée sans sexe
pénétrer dans le monochrome, la choucroute bleue et ses dauphins
je suis armé et les armes coulent
je ricane et les armes brillent
le rostre de l’espadon, la douleur est moins que la peur
tu es si belle dans ta nouvelle photo de profil

18.
Dispositifs/Dislocations propose une poétique du collage à travers différentes manifestations historiques et génériques : arts plastiques (Picasso, Rodtchenko, Jasper Johns), littérature (Denis Roche, Manuel Joseph), musique (Oval, Negativland). Olivier Quintyn reconceptualise cette notion en la décrivant comme un dispositif destiné à dramatiser des expériences de désunion entre des logiques symboliques de représentation du monde.
Retravaillant certains concepts de l’esthétique analytique de Nelson Goodman et de l’épistémologie de Paul Feyerabend, il fabrique une petite grammaire des opérations collagistes articulant divers types de fonctionnements pragmatiques. Il développe enfin une réflexion sur leur portée sociale, dans le cadre d’une critique philosophique de la culture (Theodor Adorno, Walter Benjamin). Le but de ce livre est de donner une consistance théorique à des pratiques dénaturalisant les formes de croyance et de savoir collectif par des tactiques de dislocation épistémocritique.

19.
épistémocritique

20.
descendre à 30 m. est une aventure, puis 40, ad lib.
qu’est-ce que je fais là ? qu’est-ce que j’ai oublié là-haut ?
un bon coca-cola et une douche chaude
la couleur rouge dans le monde entier
au détour d’une ruine doit rappeler
le bon goût du coca-cola comme les déesses
antiques pouvait sauver dans les bas-fonds de babylone
oui je l’ai oublié et il faut accepter la pression sur son corps
c’est la vie merveilleuse, une question d’habitude
le grand secret c’est les ET les ufo nazis
les dieux dansent dans mon sang qui peut percer mon cœur
si je descend trop le long du câble
une couronne de douze étoiles
le rayon du supermarché
(provoque)
nous faisons de la poésie dominicale
champêtre, très en deçà, très
toujours à la traîne
il faut se détacher de l’idée de performance car cela fait faire des bêtises
pourras-tu remonter ? y aller ne suffit pas

21.
le mage jaune émet ses desseins machiavéliques
par les antennes de son casque
sa cruauté est infinie
le suicide est une belle mort

22.
nous sommes si fragiles
les déterminations sont exponentielles
et donc nulles,
oui le sentiment d’attachement peut-être stimulé électriquement
te construire dans la drogue qui pèse sur les épaules
te droguer à l’envi
rien ne m’appartient pas même une publicité
me donnant la vie

la crapulerie est une détermination
la nouvelle megane coupé est l’incarnation du pur plaisir
s’arrêter à la pierre et sacrifier, vaches maigres, trois bananes
sur le sang séché des holocaustes des esclaves
souffrir et faire souffrir ne sont pas les seules joies
imaginer un amour sur une planète aride n’est pas impossible
mais l’amour d’une machine
c’est de l’attachement
j’admire le show business
qu’un moment, qu’un lieu, une épiphanie
vous êtes un peu trop vindicatif
les déterminations se multiplient
les chinois ne sont pas responsables de tout
je vous aime

23.
irai-je jusqu’à tuer, c’est une belle question
pour la vie merveilleuse
c’est mieux qu’un vie bourgeoise ou critique
j’aime tant la chanteuse de la star academy
pour l’offrir sur le sanctuaire
ouvrir sa cage thoracique avec un scalpel stérilisé argenté effilé
retirer la peau fine au-dessus des muscles vifs
les dieux au balcon, des femmes se roulent entre elles sur un épais divan
en forme de cœur
je choisis bien mes mots pour lui dire que nous allons partir
grâce à elle sauver troie
elle chante pendant le sifflement de la lame

24.
énumérer et raconter mes inimitiés (vont-elles jusqu’à la haine ?)
si j’aime leur malheur et eux donc
si j’aime leur joie
nb : ce que l’on recherche dans le sexe
n’est pas facile

25.
et dire que ces sales fils de putes
pensent que dans un poème
ça va, ça vient, ça rate, ça pue, ça jouit
sépulcres blanchis
vermine idem
souriceaux je baise la couenne noire
le sang de foutre, la bile rose
ceci est mon corps
c’est un si beau poème
au-dessus de l’horizon de l’autel
je fais de la poésie de catéchisme, c’est très important

26.
ok je force un peu sur les cachets en ce moment
les pétards ce qui enlève de l’attention
il y a trop de baleines, plus personne n’y croit
et pourtant c’est impressionnant
à voir évoluer comme un vaisseau sidéral
qui s’enfonce dans l’infini, c’est tout
mais trop c’est trop inerte la baleine
n’a plus rien de magique, le baleineau échoué
et la foule qui se lamente moi je préfère le flécher
pour faire la une quitte à me faire arracher le bras

27.
j’ai craché sur la prostituée
le mendiant
le clébard
le chou-fleur
loin il y a des vaisseaux
qui cuvent leur kérozène discrets dans la stratosphère
l’invasion est pour bientôt
non les chinois ne sont pas responsables de tout
ces saloperies d’ET et d’ufos nazis qui remettent en cause
le mystère de l’incarnation

28.
nous entrons mes camarades et moi unis
dans le temple saint et vieux comme hérode
sans qu’on s’en doute le christ panthokrator
nous regarde en disparaissant dans le mazout
à la verticale de la vie merveilleuse
il nous regarde, son regard
et disparaît
nous disparaissons
infimes

29.
atro-logie dans l’hémisphère
raye
les freux d’acier, les femelles ouvertes
pleure ma drogue la quille le pif alzheimer
pleutre comme une couleuvre
avale !

30.
la vue sur l’océan est magnifique
si l’on excepte ces satanés fils électriques
un sac plein de poulpes
la chasse sous-marine de nuit pour les langoustes
il faut remonter toute la barrière de corail
en éteignant sa torche pour ne pas se faire
pincer par les flics
un peu au large au-delà de 10 m de fond
les poissons sont moins méfiants
une raie passe comme un train
dans l’eau trouble couleur sac poubelle
je me retourne effrayé
la raie passe
d’un coup les poissons filent, tous ensemble
est-ce leur ligne médiane qui permet
une telle synchronicité ?
je reste preneur de toute réponse sérieuse (0692042201)

31.
le sexe remplit les formes des femmes
à presser, écraser, y entrer comme dans un four
au supermarché je suis les formes
qui me rendent si malheureux
je vais vous recopier la liste de mes courses
les codes-barres, les tickets de caisse, mais
il n’y a que les formes au milieu des promotions
et des têtes de gondoles, des connards abrutis en tongs et bobs
le désir et le sexe évitent l’aridité des rayons
et me flèchent en plein songe

32.
dans les films de russ meyer les femmes
parviennent à ce qu’elles veulent
grâce à leurs seins volumineux
la réalité n’est-elle pas moins complexe ?
chez le coiffeur nous nous calons
entre les seins d’une mahoraise obèse
la réalité grouille de cons
noirs velus de mouches éclatantes
ça grésille même entre les chairs
la jeune fille (que j’ai connue si jeune) doit maintenir avec la main son décolleté
lorsqu’elle lance la balle sinon tout tomberait
cela briserait quelque chose
nous serions surpris
assurément
comme lorsque la vedette de la tv laisse place
d’un coup à la neige abstraite et infinie

33.
j’ai grandi parmi les frottis
et les enclumes au beurre aussi
la caverne je la connais
les scolopendres ont la piqûre douloureuse
seigneur, couvre leurs faces d’ignominies
qu’ils implorent ton nom
seigneur aide-moi, soutiens-moi quand je suis beau,
quand je veux tuer un thon dents de chien de plus d’un mètre
aide-moi à bien le viser dans la colonne vertébrale pour le sécher net
il n’y a plus de chattes et de stupidité dans la glèbe
les tracteurs évanouis, les tas de fumiers et la ville trop chiant d’y aller
avec les bouchons et l’heure du ramassage scolaire
après le périph, après les lignes électriques, non…
dans le bleu, l’angoisse sublime du requin au coucher du soleil, dans l’eau trouble
dans tes cuisses élastiques et fluides
promis je ne me foutrais plus de la poésie des « racle-moi la muqueuse »
elles ont leur nécessité, elles sont les chattes des désœuvrés
sur leur tas de désirs (écrans plats, bibles et hard sex à la carte)
st paul sur la route de damas ouvre l’histoire
et moi je l’achève quand je tue, quand je crève, quand j’aime les agneaux dévorés
quand je vole au-dessus des coraux l’instinct dans le crâne
prêt à tuer, prêt à l’être
(tué par un blanc c’est la classe, un bouledogue moins mais quand même)
j’écoute la stridence et le raclement, la confusion, le couinement
de la chaleur des femmes que j’ai tant voulu sauter
33 c’est un cap de la vie merveilleuse
trépaner son père, essuyer les muqueuses mortes
vrombir dans les moteurs des panzer

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